Bien-être et inquiétudes pendant le confinement

Le bien-être géné­ral en Suis­se est éle­vé et il l’est res­té pen­dant le con­fi­ne­ment. Peut-être par­ce que seu­le une peti­te part de la popu­la­ti­on a été con­ta­mi­née par le Covid-19. Pour­tant, cela n’empêche pas les gens d’êt­re préoc­cu­p­és par les con­sé­quen­ces du Covid-19 sur leur vie socia­le ou leur situa­ti­on finan­ciè­re. Plus préoc­cup­ant encore, cer­tai­nes per­son­nes ont indi­qué se sen­tir très iso­lées et très préoc­cu­p­ées, en plus d’êt­re par­fois des per­son­nes à ris­que. Dans l’é­ven­tua­li­té d’u­ne deu­xiè­me vague, un examen appro­fon­di sem­ble néces­saire pour mieux iden­ti­fier les grou­pes à ris­que et prend­re des mes­u­res pro­p­res à pré­ve­nir l’i­so­le­ment social.

En règ­le géné­ra­le, les Suis­ses esti­ment d’ail­leurs que leur état de san­té géné­ral est très bon – et cela même jus­qu’à un âge avan­cé – et qu’ils ont de quoi être satis­faits de leur vie en com­pa­rai­son avec d’au­tres pays (voir le rap­port social 2016). La cri­se du coro­na­vi­rus ne sem­ble pas avoir eu un impact nota­ble sur ce sen­ti­ment. En moy­enne, les per­son­nes inter­ro­gées voi­ent leur état de san­té géné­ral et leur satis­fac­tion dans la vie d’un œil même légè­re­ment plus posi­tif que peu avant la cri­se. Il est néan­moins pos­si­ble que les per­son­nes inter­ro­gées, comp­te tenu de la cri­se, se satis­fas­sent davan­ta­ge de leur vie et de leur san­té que d’ordinaire. Not­re enquê­te indi­que que la popu­la­ti­on s’e­sti­me satis­fai­te de sa vie en géné­ra­le, quel que soit l’aspect de la vie con­sidé­ré (voir gra­phi­que 1). Seu­les 3 % des per­son­nes inter­ro­gées se disent insa­tis­fai­tes de leur vie en géné­ral, cont­re 44 % qui se disent très satis­fai­tes et même 12 % sont com­plè­te­ment satis­fai­tes de leur vie. C’est dans le domai­ne du tra­vail ou de la situa­ti­on finan­ciè­re que les gens sem­blent quel­que peu moins satis­faits. Envi­ron 10 % indi­quent ne pas être satis­faits avec leur tra­vail ou leur situa­ti­on finan­ciè­re, et envi­ron 14 % sont neu­tres quant à ces aspects de leur vie.

Graphique 1: Satisfaction par domaine de vie (en % des répondants)

La Suisse latine est davantage préoccupée par les conséquences du Covid-19

Un niveau éle­vé de satis­fac­tion dans la vie ne signi­fie nullement l’absence d’inquiétudes (voir gra­phi­que 2). Une part importan­te des répondants est non seu­le­ment préoc­cu­p­ée par la san­té de ses pro­ches (78 %), mais aus­si par sa prop­re vie socia­le (58 %) et sa situa­ti­on finan­ciè­re (40 %). De maniè­re géné­ra­le, il appa­raît éga­le­ment que les répondants de Suis­se lati­ne, c’est-à-dire des can­tons roman­ds et du Tes­sin, sont – dans tous les domai­nes à l’exception de la vie socia­le – plus préoc­cu­p­és que leurs homo­lo­gues de Suis­se alé­ma­ni­que. Cela s’explique pro­ba­ble­ment par le fait qu’avant et pen­dant la péri­ode d’enquête, la Suis­se lati­ne a été davan­ta­ge tou­chée par le Covid-19.

Graphique 2: Préoccupation concernant l’impact de crise du coronavirus sur différents domaines de la vie par région linguistique (en % des répondants)

Note: CH‑A = Suisse alémanique, CH‑L = Suisse latine.

En matiè­re de san­té, les inquiétu­des des per­son­nes inter­ro­gées con­cer­nant la san­té de leurs pro­ches l’emportent sur les inquiétu­des con­cer­nant leur prop­re san­té. 56 % des répondants ne sont que peu ou pas du tout préoc­cu­p­és au sujet de leur prop­re san­té, alors que seu­le­ment 23 % d’entre eux sont tout aus­si peu inquiets pour la san­té de leurs pro­ches. Le degré d’inquiétude pour sa prop­re san­té aug­men­te avec l’âge. Si 30 % des per­son­nes de 18 à 30 ans se disent « plu­tôt inquiè­tes », la pro­por­ti­on à cet égard est de 65 % chez les plus de 65 ans. Cepen­dant, même dans cet­te tran­che d’âge, qui par défi­ni­ti­on appar­tient au grou­pe à ris­que, 28 % ne sont que peu préoc­cu­p­ées et 7 % ne le sont pas du tout.

Les con­sé­quen­ces de la cri­se sur la situa­ti­on finan­ciè­re révè­lent un sché­ma légè­re­ment dif­fé­rent. Ici, les per­son­nes acti­ves sont beau­coup plus préoc­cu­p­ées que cel­les à la retrai­te. Dans l’ensemble, cepen­dant, les préoc­cup­a­ti­ons con­cer­nant les consé­quences sur la situa­ti­on finan­ciè­re sont un peu moins fré­quen­tes qu’en ce qui con­cer­ne d’autres domai­nes de la vie. Il n’est res­te pas moins qu’u­ne part non nég­li­ge­ab­le (40 %) des per­son­nes inter­ro­gées est préoc­cu­p­ée par les con­sé­quen­ces du Covid-19 sur sa situa­ti­on finan­ciè­re, et voi­re même très préoc­cu­p­ées par cel­les-ci (envi­ron 16 % et même 19 % dans la Suis­se lati­ne). Fina­le­ment, les dif­fé­ren­ces ent­re femmes et hom­mes sont mini­mes voi­re non significatives.

La majorité des gens s’est sentie parfois isolée, mais a pu compter sur un soutien émotionnel

Dans le con­tex­te de la cri­se du Covid-19 s’est posée la ques­ti­on de l’i­so­le­ment social suite au con­fi­ne­ment. Dans l’ensemble, on peut dire que de nombreu­ses per­son­nes ont été pri­vées de la com­pa­gnie d’autres per­son­nes et se sont sen­ties de temps en temps iso­lées. Le sen­ti­ment d’être exclu et délais­sé ne con­cer­nait néan­moins qu’une mino­ri­té. Not­re ana­ly­se mont­re que 8 % des per­son­nes inter­ro­gées esti­ment avoir très sou­vent man­qué de con­ta­cts humains,  19 % sou­vent, et 38 % par­fois. Tou­te­fois, seu­les 2% des per­son­nes inter­ro­gées se sont sen­ties très sou­vent exclues ou délais­sées, 4 % sou­vent et 13 % par­fois. 50 % n’ont jamais éprou­vé ce sen­ti­ment. Notons que les femmes ont eu ten­dance à se sen­tir plus iso­lées et à man­quer plus sou­vent de com­pa­gnie. Il n’y a cepen­dant pas de dif­fé­ren­ces signi­fi­ca­ti­ves en fonc­tion de l’âge.

Si une gran­de par­tie de la popu­la­ti­on a pu con­ti­nu­er à comp­ter sur un sou­ti­en émo­ti­on­nel pen­dant cet­te péri­ode, 8 % des per­son­nes inter­ro­gées décla­rent cepen­dant ne jamais avoir pu comp­ter sur un tel sou­ti­en (gra­phi­que 3). A noter qu’on con­sta­te des dif­fé­ren­ces import­an­tes selon le type de ména­ge et le gen­re. Ain­si, ce sont princi­pa­le­ment les hom­mes vivant seuls qui ne peu­vent comp­ter que sur un fai­ble sou­ti­en émo­ti­on­nel. Envi­ron 30 % d’ent­re eux disent n’a­voir jamais (ou rare­ment) per­son­ne à qui se con­fier et ils se sen­tent éga­le­ment plus iso­lés des autres voi­re exclus. Il est néan­moins intéres­sant de noter qu’ils ne décla­rent pas plus sou­vent man­quer de com­pa­gnie.  Fina­le­ment, les chif­fres con­cer­nant les femmes vivant seu­les ou assumant seu­les l’é­du­ca­ti­on de leurs enfants cor­re­spon­dent à ceux qu’on trouve dans la popu­la­ti­on dans son ensemble.

Graphique 3: Présence d’un soutien émotionnel au cours des quatre dernières semaines (en % des répondants)

Note: Échelle de 0 = jamais à 6 = toujours. 
Conclusion

Les résul­tats mon­t­rent que le bien-être géné­ral en Suis­se était en moy­enne éle­vé, même pen­dant le con­fi­ne­ment, et que la popu­la­ti­on se sent sou­te­nue sur le plan émo­ti­on­nel. Cepen­dant, une pro­por­ti­on importan­te de per­son­nes se dit éga­le­ment préoc­cu­p­ée par les con­sé­quen­ces de la cri­se du Covid-19 sur divers aspects de son exis­tence. De même, il ne faut pas oublier qu’un nombre non nég­li­ge­ab­le de per­son­nes se sent très iso­lé et très préoc­cu­pé. En out­re, ces pre­miè­res ana­ly­ses ont déjà mon­tré qu’il exis­te des grou­pes de popu­la­ti­on plus vul­né­ra­bles que d’autres. Un examen plus appro­fon­di est néces­saire pour iden­ti­fier les grou­pes à ris­que et, dans l’éventualité d’une deu­xiè­me vague de Covid-19, prend­re des mes­u­res pro­p­res à pré­ve­nir l’isolement social, la soli­tu­de et l’inquiétude.

Not­re ana­ly­se a pré­sen­té un aper­çu de la situa­ti­on pen­dant le con­fi­ne­ment. Il sera intéres­sant de compa­rer ces résul­tats avec ceux des enquê­tes de sui­vi afin de mieux com­prend­re com­ment le Covid-19 affec­te le bien-être de la popu­la­ti­on à plus ou moins long terme.

Enquê­te FORS Covid-19 MOSAiCH
Afin de con­tri­buer à la com­pré­hen­si­on des effets du Covid-19 sur la socié­té en Suis­se, MOSAiCH a ajou­té des ques­ti­ons sur le Covid-19 et sur les mes­u­res pri­ses pour y fai­re face. MOSAiCH est une enquê­te socio­logique annu­el­le. Les ques­ti­ons por­tent sur les thè­mes du bien-être, du tra­vail, de la con­ci­lia­ti­on de la vie fami­lia­le et pro­fes­si­onnel­le ain­si que de la poli­tique. Ent­re fin avril et fin mai 2020, 1’937 per­son­nes âgées de 18 ans ou plus vivant dans des ména­ges pri­vés en Suis­se ont répon­du au ques­ti­onn­aire en ligne. Les résul­tats ont été pon­dé­rés sta­tis­ti­que­ment afin d’ob­tenir une mei­lleu­re repré­sen­ta­ti­vi­té de la popu­la­ti­on suis­se. Ces person­nes seront inter­ro­gées une deu­xiè­me fois à l’aut­om­ne 2020 et une troi­siè­me fois au prin­temps 2021 pour mes­u­rer les effets du Covid-19 à plus long terme.

Cet arti­cle est tiré de la fiche d’in­for­ma­ti­on no 1 de l’en­quê­te FORS Covid-19 MOSAiCH.


Image: pixabay.com

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