Flüchtlinge

Les difficultés d’intégration des hommes et des femmes réfugiés sur le marché du travail dans les économies occidentales

Introduction

Les mouvements de réfugiés sont en augmentation depuis des décennies. Pour les administrations publiques des sociétés occidentales, la priorité est d’assurer une intégration économique aux réfugiés car elle leur permet d’apprendre la langue, les coutumes du pays, de s’affranchir des prestations sociales et de contribuer à la société. Ce qui est particulièrement frappant, est la différence entre le taux de participation au marché du travail des hommes (50%) et des femmes (40%) réfugiés dans les dix années qui suivent leur immigration. La question est de savoir si ces différences sont dues à la discrimination des employeurs à l’égard des demandeurs d’emploi féminins ou si d’autres facteurs empêchent leur intégration.

Démarche de recherche

Étudier la discrimination est difficile car les employeurs donnent souvent des réponses socialement désirables. Par conséquent, nous utilisons l’expérimentation, qui consiste en une enquête en ligne dans laquelle une vignette (=description fictive d’une situation) est présentée aux répondants. La vignette décrit le curriculum vitae d’une personne réfugiée dont de nombreuses caractéristiques varient de manière aléatoire (genre, état civil, âge, etc.). Ainsi, les employeurs ont été moins susceptibles de remarquer que nous étudions la discrimination et donc répondent plus sincèrement.

Chaque employeur a été confronté à plusieurs vignettes présentant des profils très différents et ils ont été invités à indiquer dans quelle mesure ils étaient prêts à interviewer un de ces candidats pour un emploi peu qualifié. Nous avons étudié cette discrimination en Autriche, Allemagne et Suède parce que ces pays ont été les plus concernés par des afflux de réfugiés en provenance de Syrie, d’Irak et d’Afghanistan pendant la “crise des réfugiés” (2011-2017).

Résultats

De façon inattendue, nous constatons que les employeurs préfèrent statistiquement de manière hautement significative les femmes aux hommes réfugiés (comme le montre la Figure 1, les hommes sont évalués moins bien que les femmes à hauteur environ de 0.15 points sur une échelle de 1-10). Notre explication est que les hommes sont discriminés en raison des stéréotypes négatifs auxquels ils sont associés dans la presse (criminalité, agressivité, trafic de stupéfiants). En outre, nous constatons que les employeurs discriminent les personnes ayant des enfants (Figure 1). La question est de savoir si ce résultat masque des différences entre les genres. Des analyses supplémentaires soulignent que, contrairement aux hommes, les femmes sont davantage discriminées si elles ont des enfants.

Figure 1 | Effets des variables du CV fictif sur la probabilité d’obtenir un entretien d’embauche

Figure: Alix d’Agostino, DeFacto

Conclusion et implications

Comme les employeurs discriminent les candidats masculins, l’administration publique devrait sensibiliser les employeurs aux stéréotypes concernant les hommes issus du moyen-orient et/ou des pays musulmans. Il en va de même pour les mères (réfugiées). Les psychologues suggèrent des stratégies afin d’éliminer ces biais, qui consistent en une instruction permettant aux employeurs d’adopter le point de vue des réfugiés et de développer de l’empathie à leur égard. Également, des programmes de mentorat dans lesquels un professionnel présente un·réfugié à son réseau d’emploi peuvent également être utiles.

En outre, l’administration publique peut aider les réfugiés en proposant des mesures d’intégration supplémentaires (cf. Figure 1). Fossati et Liechti (2020) constatent que les employeurs sont plus susceptibles d’embaucher des réfugiés, qui, au-delà d’un cours d’intégration obligatoire, ont également participé à d’autres activités comme un stage ou du bénévolat. Malheureusement, ce résultat ne s’applique qu’aux employeurs ayant déjà une attitude positive envers les immigrés avant l’étude. Cela signifie que les politiques d’intégration n’influencent pas les employeurs qui ne veulent tout simplement pas travailler avec des réfugiés.

En conclusion, le faible taux d’emploi des femmes réfugiées (qui ne sont pas mères) n’est pas causé par la discrimination des employeurs. Il est probablement la résultante de facteurs comme les rôles de genre traditionnels, le manque d’éducation et/ou d’expérience professionnelle des refugiées. Il est clair qu’un ensemble diversifié de mesures est nécessaire afin d’aborder l’intégration économique des différents groupes de réfugiés.


Note: Cet article a été publié dans le cadre du Policy Brief No. 7 de l’IDHEAP.

Références:

  • Fossati, F., Knotz, C., Liechti, F. and I. Otmani (2022). The Gender Employment Gap among Refugees and the Role of Employer Discrimination: Experimental Evidence from the German, Swedish and Austrian Labor Markets. International Migration review.

  • Fossati, F. and Liechti, F. (2020). Integrating refugees through public policy: A comparative survey experiment on hiring preferences. Journal of European Social Policy, 30(5) 601-615.

Image: flickr.com

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