Bien-être en Suisse: l’exclusion rend malheureux

La qua­li­té de vie est éle­vée en Suis­se. Les Suis­ses et les Suis­ses­ses sont con­tents de la vie qu’ils mènent, expri­ment princi­pa­le­ment des émo­ti­ons posi­ti­ves et se sen­tent maî­tres de leur vie. Le Rap­port social 2016 exami­ne sur la base d’analyses appro­fon­dies le bien-être de la popu­la­ti­on suisse.

Un débat portant sur ce thè­me aura lieu ce soir, 3 novembre, à l’uni­ver­si­té de Neuchâtel. 

La Suis­se occupe régu­liè­re­ment le haut des clas­se­ments inter­na­tion­aux sur la qua­li­té de vie et le bien-être. Le sen­ti­ment indi­vi­du­el de bien-être est pour­tant com­ple­xe et il n’est pas évi­dent de l’appréhender.

Not­re bien-être dépend d’a­bord de l’éva­lua­ti­on que nous nous fai­sons de not­re situa­ti­on: dans quel­le mes­u­re som­mes-nous satis­faits des dif­férents aspects éco­no­mi­ques, finan­ciers et soci­aux de not­re vie ou encore de not­re situa­ti­on per­son­nel­le. Ensui­te, qu’el­les soi­ent posi­ti­ves ou néga­ti­ves, les émo­ti­ons tel­les que la joie, le bon­heur, la colè­re ou le chag­rin sont des mani­fes­ta­ti­ons de not­re bien-être. Et enfin, il y a encore la ques­ti­on du sens et de la val­eur de not­re exis­tence: est-ce que nous con­sidé­rons que not­re vie a un sens, qu’el­le est bien rem­plie, que nous som­mes uti­les et libres de nos choix?

Glo­ba­le­ment, le fait de con­sidé­rer le bien-être selon dif­férents angles ne chan­ge pas le résul­tat : le bien-être est élevé.

Formation et emploi : le tout est d’en faire partie !

For­ma­ti­on et emploi sont des domai­nes import­ants de vie par rap­port au bien-être. La popu­la­ti­on suis­se est très satis­fai­te du sys­tème de for­ma­ti­on et elle l’est éga­le­ment de la vie pro­fes­si­onnel­le et des con­di­ti­ons de tra­vail (Figu­re 1).

Figure 1:

Tou­te­fois, le taux de satis­fac­tion dimi­nue lors­que les con­di­ti­ons de tra­vail sont péni­bles, par exemp­le en rai­son du stress, du bruit ou du tra­vail de nuit. De maniè­re géné­ra­le, plus la posi­ti­on pro­fes­si­onnel­le est éle­vée, plus les gens sont satis­faits de leur tra­vail. Mais les dif­fé­ren­ces sont plu­tôt fai­bles et, au pre­mier regard, même les dif­fé­ren­ces de reve­nu sem­blent avoir une fai­ble influ­ence sur le bien-être géné­ral. Cer­tes, les per­son­nes à haut reve­nu sont plus satis­fai­tes de leur situa­ti­on finan­ciè­re, sont moins tris­tes et se font moins de sou­cis. Pour­tant, leur degré géné­ral de satis­fac­tion n’est pas mei­lleur et elles n’é­prou­vent pas plus de joie.

L’exclusion menace le bien-être

En revan­che, il sem­ble que le bien-être soit séri­eu­se­ment menacé lors­que des per­son­nes sont exclues par­ce qu’el­les sont relé­guées en mar­ge du sys­tème de for­ma­ti­on ou du mar­ché du tra­vail ou par­ce qu’el­les bas­cu­lent dans la pauvreté.

Pres­que tous les jeu­nes en fin de sco­la­ri­té ayant accé­dé à la vie pro­fes­si­onnel­le sont satis­faits, même s’il ne s’a­git que d’u­ne solu­ti­on tran­si­toire (Figu­re 2). Tou­te­fois, la majo­ri­té de ceux qui n’ont pas encore de solu­ti­on sont mécon­tents de leur situa­ti­on. Quant aux per­son­nes qui sont au chô­mage ou à la retrai­te en rai­son d’une inva­li­di­té, elles sont géné­ra­le­ment moins satis­fai­tes de leur vie, par­ti­cu­liè­re­ment sur le plan finan­cier, que cel­les qui ont un emploi ou qui ont quit­té le mar­ché du tra­vail pour d’au­tres raisons.

Figure 2:

On ne s’habitue pas à la pauvreté

Les per­son­nes vivant dans la pro­spé­ri­té sont légè­re­ment plus satis­fai­tes que cel­les qui sont dans une situa­ti­on pré­cai­re et elles le sont bien davan­ta­ge que cel­les qui vivent dans la pau­vre­té. Ces diver­gen­ces s’ac­crois­sent avec le temps. Alors qu’au fil des ans le niveau de satis­fac­tion res­te con­stant chez les per­son­nes aisées, il dimi­nue légè­re­ment chez cel­les qui sont en situa­ti­on pré­cai­re. Cet­te baisse est beau­coup plus signi­fi­ca­ti­ve pour les per­son­nes qui sont dans la pau­vre­té : elles ne s’habituent pas à la pauvreté.

Le bien-être est important

Les résul­tats du Rap­port social 2016 soulign­ent l’importance d’analyser le bien-être par domai­ne de vie et par carac­té­ris­ti­ques de la popu­la­ti­on. En effet, en ne con­sidé­rant que le degré éle­vé de satis­fac­tion géné­ra­le, on ris­que d’omettre la mise en place de mes­u­res poli­ti­ques novat­ri­ces et de réfor­mes ou d’accepter des iné­ga­li­tés puis­que la popu­la­ti­on paraît con­tente. Des étu­des régu­liè­res sur l’évolution de la socié­té, tel­les que menées par le Rap­port social, per­met­tent de rédu­i­re ce ris­que en ana­ly­sant des pro­b­lé­ma­ti­ques socio-poli­ti­ques sous dif­férents angles. L’analyse des aspects sub­jec­tifs du bien-être en fait partie.

Rap­port social 2016
Le Rap­port social rend comp­te de la situa­ti­on actu­el­le de la socié­té suis­se et de ses déve­lo­p­pe­ments sur la base de l’analyse sys­té­ma­tique de don­nées. Publié avec le sou­ti­en du Fonds natio­nal suis­se de la recher­che sci­en­ti­fi­que, le Rap­port social paraît tous les quat­re ans depuis 2000. La pré­sen­te édi­ti­on se foca­li­se sur la thé­ma­tique du bien-être. Le Rap­port social con­tient, en plus d’une sélec­tion de 75 indi­ca­teurs, cinq con­tri­bu­ti­ons ana­ly­ti­ques qui se pen­chent sur la pro­b­lé­ma­tique du bien-être. Pour éta­b­lir ce rap­port, les auteurs ont ras­sem­blé les don­nées four­nies par de nombreu­ses sources natio­na­les et inter­na­tio­na­les et les ont éva­luées et ana­ly­sées  sous des angles spé­ci­fi­ques. Ils n’ont uti­li­sé que des don­nées collec­tées selon des métho­des fia­bles et pro­venant d’é­chan­til­lons non biaisés.

Des don­nées, gra­phi­ques et infor­ma­ti­ons sup­plé­men­taires sont dis­po­nibles sous for­me élec­tro­ni­que sur le site www.rapportsocial.ch. Des indi­ca­teurs par­ti­cu­liers peu­vent être con­sul­tés sur le site web de FORS.

Les Rap­ports socia­les sont à com­man­der sur Seis­mo­ver­lag.

Réfé­rence : Fran­zis­ka Ehr­ler, Felix Bühl­mann, Peter Fara­go, Fran­çois Höpf­lin­ger, Domi­ni­que Joye, Pas­qua­li­na Per­rig-Chiel­lo und Chris­ti­an Suter (dir.) Rap­port Social 2016 : Bien-être. Zürich: Seismo-Verlag.


Image: Wiki­me­dia Com­mons.

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