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Migration de l’électorat autour de la social-démocratie suisse

Matthias Enggist, Nadja Mosimann, Tarik Abou-Chadi, Reto Bürgisser, Silja Häusermann, Reto Mitteregger
2nd March 2023

Près de la moitié des électrices et électeurs qui avaient encore voté pour le PS Suisse aux élections nationales de 2015 ont changé d’avis aux élections nationales de 2019. Celles et ceux qui n’ont pas totalement boudé les urnes en 2019 se sont principalement détourné·e·s du PS pour se tourner vers les Verts. Comme le montrent nos analyses ci-dessous, les migrations du PS vers l’UDC, souvent évoquées par les médias, sont pratiquement inexistantes.

1 : Pertes aux Verts, mais pas à l’UDC

Lors de chaque élection, il est important pour un parti de mobiliser de nouvelles électrices et de nouveaux électeurs. Mais il est tout aussi important qu’il puisse conserver les électrices et électeurs qu’il a réussi à gagner lors des dernières élections. La figure 1 montre que le PS Suisse a moins bien réussi à remplir cette dernière tâche lors des élections fédérales de 2019 que lors de toutes les autres élections depuis 1995.

Dans la figure 1, chaque barre représente l’une des élections fédérales depuis 1995. La barre entière comprend tou·te·s les électrices et électeurs qui ont choisi le PS lors des élections qui ont précédé l’année électorale indiquée sous la barre. Les différentes couleurs de la barre indiquent pour qui ces électrices et électeurs du PS ont voté au cours de l’année électorale indiquée sous la barre.

Figure 1 : Décision de vote des personnes ayant voté pour le PS Suisse lors des dernières élections, 1995-2019
 
Exemple de lecture : En 1995, environ 70% des personnes qui avaient voté PS en 1991 votent à nouveau pour le PS, tandis que près de 20% passent dans le camp des non-votant·e·s. En 1995, environ 2 % des électrices et électeurs du PS de 1991 se tournent vers les Verts, environ 1 % vers le PDC, environ 4 % vers le PLR et environ 3 % vers l’UDC.
Illustration propre basée sur les données de l’étude électorale suisse Selects.

Alors que les pertes dans le camp des non-votant·e·s (barre grise-claire) tendent à diminuer au fil du temps, la figure 1 met en évidence l’augmentation de la barre verte-pomme, qui représente les migrations d’électrices et d’électeurs vers le PES. La part de ces migrations est particulièrement importante lors des “élections climatiques” de 2019. Le deuxième vainqueur des élections de 2019, le PVL, a également développé en 2019 un effet d’attraction beaucoup plus fort sur les ancien·ne·s électrices et électeurs du PS que lors de toutes les élections précédentes – même s’il se situe à un niveau nettement inférieur à celui du PES (dans la Policy Brief sur le “potentiel électoral de la social-démocratie suisse“, nous montrons toutefois que l’attrait du PVL parmi les électrices et électeurs actuel·le·s et potentiel·le·s du PS ne doit pas être sous-estimé). A l’inverse, il n’est pas vrai qu’en 2019, parmi les électrices et électeurs PS ayant migré de parti, on trouve surtout d’ancien·ne·s électrices et électeurs des Verts.

Le graphique 2 montre clairement que le PS parvient à gagner quelques non-électrices et non-électeurs d’une élection à l’autre. En revanche, le PS a de moins en moins de succès au fil du temps pour attirer les électrices et électeurs d’autres partis. Les figures 1 et 2 nous apprennent en outre que les départs du PS vers la droite ont été rares au cours des trois dernières décennies : les pertes vers l’UDC et le PLR sont marginales depuis le milieu des années 1990. C’est vers les partis du “centre” nouvellement formés que nous observons le plus de départs vers un autre camp idéologique, notamment lorsque le PBD s’est présenté pour la première fois aux élections nationales en 2011 en tant que nouvelle force politique.

En bref, le PS perd de plus en plus d’électrices et d’électeurs au profit des Verts, mais ne les perd pas pour autant au profit de l’UDC. Parallèlement, le PS parvient de moins en moins à convaincre les électrices et électeurs du PES de voter socialiste lors d’une élection suivante, ce qui fait qu’au fil du temps, le PES remplace le PS en tant que gagnant net des flux d’électrices et d’électeurs dans l’éventail des partis de gauche. Les données de SELECTS montrent que le PS perd principalement des électrices et électeurs à hauts revenus, hautement éduqué·e·s et de sexe féminin. Et ce sont précisément ces groupes d’électrices et d’électeurs qui semblent se sentir particulièrement à l’aise avec les Verts, comme le montre le paragraphe suivant.

Figure 2 : Choix électoral précédent des nouvelles·aux électrices et électeurs PS, 1995-2019
 
Exemple de lecture : parmi les nouvelles électrices et nouveaux électeurs du PS en 1995, 17% viennent du PES, 6% du PDC, 21% du PLR et 4% de l’UDC. Plus de 50 % des nouvelles électrices et nouveaux électeurs du PS en 1995 sont d’ancien·ne·s non-électrices et non-électeurs ou de nouvelles électrices et nouveaux électeurs.
Illustration propre basée sur les données de l’étude électorale suisse Selects.
2 : Qui vote aujourd’hui pour le PS ?

Ce sont en grande partie les Suisse·ss·es de plus de 60 ans, les diplômé·e·s des universités et des hautes écoles spécialisées, les citadin·e·s, les travailleuses et travailleurs qualifié·e·s dans les professions interpersonnelles (par exemple les enseignant·e·s, les médecins ou les travailleuses et travailleurs sociaux) et les électrices et électeurs aux revenus moyens qui forment aujourd’hui l’électorat du PS (voir tableau 1). Les mêmes caractéristiques constituent également l’électorat des Verts (en moyenne toutefois plus jeune). Est-ce que les similitudes entre les électorats du PS et des Verts expliquent les transferts d’électrices et d’électeurs du PS vers les Verts ?

Tableau 1 : Comparaison entre les électorats du PS et d’autres partis suisses

    parti  
    PS PES PVL Centre PLR UDC Non-électrices & non-électeurs
Caractéristique Éducation plutôt élevé·e = = . = plutôt bas plutôt bas
Classe

Spécialistes Socioculturel·le·s

= Managers . Managers

Travailleuses et travilleurs de production/petits indépendant·e·s

Travailleuses et travailleurs des services/de production
Âge 60+ plutôt jeune plutôt jeune = = = plutôt jeune
Sexe Équilibré·e Femmes = = Hommes Hommes Femmes
Lieu de résidence Ville = Agglomération Campagne Agglomération Campagne .
Légende :
= indique une concordance entre l’électorat du PS et celui du parti mentionné dans la colonne en ce qui concerne la caractéristique discutée dans la ligne.
. signale qu’il n’y a pas de groupe marquant dans l’électorat mentionné dans la colonne correspondante pour la caractéristique mentionnée dans la ligne, ou que l’électorat ressemble ici à l’électorat global en ce qui concerne la répartition des caractéristiques.
Exemple de lecture : l’électorat du PS a tendance à être très instruit. Il en va de même pour le PES, le PVL et le PLR. Les électrices et électeurs de l’UDC et les non-électrices et non-électeurs ont en revanche un niveau de formation plutôt bas. Au centre, tous les niveaux de formation sont représentées à peu près de la même manière que dans l’ensemble de l’électorat.
Illustration propre basée sur les données de l’étude électorale suisse Selects.

Le tableau 1 présente quelques caractéristiques qui permettent de décrire sommairement les électorats : Éducation, classe professionnelle, âge, sexe et lieu de résidence. Pour chacune de ces caractéristiques, le tableau indique dans une première colonne quel groupe de formation, de classe professionnelle, d’âge ou de sexe est le plus représenté dans l’électorat du PS et où les électrices et électeurs du PS habitent le plus souvent.

Dans les colonnes suivantes, ces électrices et électeurs clés du PS sont comparés à celleux des autres plus grands partis suisses, ainsi qu’au groupe des non-électrices et non-électeurs. Si un autre parti a le même noyau d’électrices et d’électeurs que le PS, cela est indiqué par un signe égal. Si un parti a tendance à être dominé par un autre groupe d’électrices et d’électeurs que le PS, le tableau le mentionne. Un point signale qu’un parti n’a pas de groupe dominant pour cette caractéristique.

Le tableau 1 montre clairement que les électrices et électeurs du PS ressemblent le plus clairement à l’électorat du PES : les deux électorats sont principalement hautement éduqués, travaillent comme spécialistes socioculturels et habitent dans des villes. L’électorat des Verts est seulement plus jeune et plus féminin que celui du PS. Nous constatons également de grandes différences entre les électrices et électeurs du PS et de l’UDC. Seule la structure d’âge de leur électorat les unifie. Comme tous les partis établis en Suisse (et ailleurs), ce sont surtout les électrices et électeurs ayant atteint ou approchant l’âge de la retraite qu’ils parviennent à attirer de manière supérieure à la moyenne.

3 : Que veulent les électrices et électeurs du PS ?

La similitude entre les électrices et électeurs du PS et du PES, respectivement la différence entre les électrices et électeurs du PS et de l’UDC, se reflète-t-elle aussi dans ce que veulent les électorats respectifs ? Ou bien existe-t-il des thèmes sur lesquels les positions des électrices et électeurs du PS et du PES se distinguent ou des thèmes sur lesquels les électrices et électeurs du PS et de l’UDC ne sont pas si différents ?

Les figures 3 et 4 montrent, sur la base des données de l’European Social Survey de 2016, la probabilité de voter pour le PS et le PES (figure 3) ainsi que pour l’UDC (figure 4) en fonction des attitudes sur six thèmes différents (attitudes sur l’immigration, les droits des femmes et des minorités sexuelles, l’intégration européenne, les retraites, l’assurance chômage et le soutien public aux services de garde d’enfants). Les graphiques indiquent d’une part si l’électorat de ces partis est plus favorable ou plus défavorable à un thème que l’ensemble de la population. D’autre part, la pente de la ligne indique dans quelle mesure les attitudes envers un thème donné prédisent le vote pour un parti : plus la ligne est raide, plus les attitudes envers ce thème sont responsables du fait que quelqu’un vote pour le parti en question.

La figure 3 montre que dans tous les domaines examinés ici, les attitudes de gauche en matière de politique de distribution et les attitudes progressistes en matière de politique sociale rendent le vote pour le PS plus probable. Le PS est plus populaire auprès des personnes qui sont favorables à des retraites généreuses, à des prestations pour les personnes au chômage et à des services publics de garde d’enfants qu’auprès des personnes qui considèrent que l’Etat n’a pas de responsabilité dans ces domaines.

Même si, comme décrit plus haut, l’électorat du PS est aujourd’hui fortement marqué par des personnes ayant un niveau de formation élevé et des revenus moyens et que les personnes ayant un niveau de formation et des revenus faibles ne sont pas (plus) surreprésentées au sein du PS, son électorat actuel semble voter pour le PS non pas en dépit, mais aussi en raison de ses positions de gauche en matière de politique de distribution. Le PS est également populaire auprès des personnes qui s’engagent fortement pour les droits des minorités sexuelles et des femmes, pour un rattachement plus fort de la Suisse à l’UE et pour l’immigration.

En outre, les questions relatives à l’immigration sont le facteur le plus important pour le vote PS. Les positions fortement sceptiques en matière d’immigration empêchent presque totalement de voter pour le PS (et ne sont donc guère représentées dans l’électorat du PS), alors que le PS obtient une part électorale de près de 40% chez les personnes fortement favorables à l’immigration. Tout comme les positions de gauche en matière de politique de distribution, les positions progressistes en matière de politique sociale sont donc également déterminantes pour un vote en faveur du PS. En agrégat au moins, l’électorat actuel du PS ne semble prêt à renoncer ni à la politique de distribution de gauche, ni à la politique sociétale progressiste – il veut explicitement les deux.

Figure 3. Probabilité de voter pour le PS et le Parti vert (PES) en fonction des attitudes sur différents thèmes

Exemple de lecture : une personne qui pense que le rattachement de la Suisse à l’UE devrait être nettement renforcé vote pour le PS avec une probabilité de près de 30 %. Plus une personne pense que le rattachement à l’UE est déjà trop avancée, plus la probabilité de voter PS diminue. Parmi les personnes qui pensent clairement que le rattachement de la Suisse à l’UE est déjà allé trop loin, près de 10 % votent pour le PS. Plus une courbe monte en flèche, plus l’opinion sur le thème correspondant est significative pour le choix ou non du parti.
Illustration propre basée sur les données de l’European Social Survey (ESS 2016).

 

Figure 4 : Probabilité de voter pour l’UDC en fonction des attitudes sur différents thèmes.

Illustration propre basée sur les données de l’European Social Survey (ESS 2016).

La comparaison des attitudes de l’électorat du PS, du PES et de l’UDC permet de comprendre pourquoi les migrations d’électrices et d’électeurs entre le PS et le PES sont fréquentes, alors qu’elles sont rares entre le PS et l’UDC. Le PES obtient également de très bons résultats auprès des électrices et électeurs ayant des positions de gauche en matière de politique de distribution et, surtout, auprès des électrices et électeurs ayant des positions progressistes en matière de politique sociale. En revanche, les électorats du PS et de l’UDC ont des positions opposées sur chacun des six thèmes étudiés ici. Aucune attitude n’augmente la probabilité de voter à la fois pour l’UDC et pour le PS. Comme le montre la figure 4, il n’y a pas de points de recoupement qui unissent les électrices et électeurs du PS et de l’UDC.

Le thème de l’immigration illustre de manière impressionnante à quel point les électorats du PS et de l’UDC se distinguent. Comme au PS, ce thème occupe une place centrale à l’UDC. Parmi les électrices et électeurs fortement sceptiques à l’égard de l’immigration, l’UDC atteint une probabilité de vote de près de 80%. L’UDC et le PS marquent donc tous deux des points sur le thème de l’immigration, mais avec des positions opposées sur ce domaine politique.

Alors qu’une comparaison entre les attitudes politiques des électorats du PS et du PES révèle principalement des similitudes, des différences peuvent être constatées en ce qui concerne l’importance de thèmes spécifiques pour la décision de vote. En particulier, les attitudes envers l’assurance-chômage en tant que politique sociale classique (et un peu moins clairement envers les services publics de garde d’enfants) semblent mieux prédire le vote PS que le vote PES, tandis que les attitudes envers les droits des femmes et des minorités sexuelles ont une influence légèrement plus forte sur le vote PES que sur le vote PS. De telles différences entre les partis sociaux-démocrates et verts se retrouvent également en Europe occidentale : les partis sociaux-démocrates mobilisent davantage leurs électrices et électeurs sur des thèmes de politique de distribution ; les partis verts se profilent plutôt sur des thèmes de politique sociétale. Il est toutefois intéressant de noter que les personnes ayant des opinions clairement favorables à l’immigration votent plus souvent pour le PS que pour le PES.

4 : Avec quels thèmes le PS peut-il marquer des points ?

Après avoir constaté les similitudes entre le PS et le PES (en termes de composition et d’attitude de leur électorat), qui pourraient expliquer le passage du rouge au vert, il est bien sûr important de savoir ce qui incite les électrices et électeurs à voter pour l’un ou l’autre parti. Outre la différence de structure d’âge, les paragraphes précédents ont mis en lumière des différences entre le PS et le PES, notamment en ce qui concerne l’importance de différents thèmes. Dans cette dernière section, nous approfondissons ces résultats à l’aide d’une question de SELECTS, qui demande à toutes les personnes quel parti elles considèrent comme le plus compétent dans un domaine politique donné.

Figure 5 : Compétence thématique des partis politiques

Exemple de lecture : En 2011, 2015 et 2019, 26 % en moyenne de toutes les personnes interrogées ont désigné le PLR comme le parti le plus compétent sur la question de l’intégration européenne. 24 % ont opté pour l’UDC et 16 % ont cité le PS comme le parti le plus compétent. 23 % des personnes interrogées n’ont pas pu se décider pour un parti ou ont cité un autre parti que les six mentionnés.
Illustration propre basée sur les données de l’étude électorale suisse Selects 2011, 2015 et 2019.

La figure 5 montre, pour cinq domaines politiques, la part des électrices et électeurs suisses qui perçoivent un parti comme étant le plus compétent dans ce domaine (la moyenne des années 2011, 2015 et 2019 est présentée). Bien que les électrices et électeurs ne soient pas unanimes sur le fait de savoir quel parti est le plus compétent dans quel domaine, des différences intéressantes apparaissent entre les thèmes. En se concentrant sur le PS (en rouge), on constate que le PS occupe une place prépondérante dans le domaine de la politique sociale, où il est perçu comme le parti le plus compétent (et même par 75% comme le parti le plus engagé dans ce domaine) par 44% et donc bien au-delà de son électorat.

En outre, le PS est également considéré comme compétent dans d’autres thèmes par une partie importante de la population, comme par exemple la politique européenne (16%) et surtout la politique migratoire (26%), où le PS détient à nouveau, au-delà de son électorat, la nette domination thématique auprès des personnes qui ont une attitude positive vis-à-vis de l’immigration (au total, il la partage avec l’UDC). Dans tous ces domaines, le PES a obtenu des résultats relativement mauvais au cours de la dernière décennie. Il est perçu par moins de cinq pour cent (et donc même pas par son propre électorat global) comme le parti le plus compétent dans ces domaines. La domination thématique dans le camp de gauche semble plutôt revenir au PS qu’au PES sur ces sujets.

En revanche, la figure 5 montre que le PS a du mal à s’imposer sur le thème de l’environnement. Seuls 4 % citent le PS comme le parti le plus compétent en matière d’environnement. Le PES (44%) et les PVL (25%) occupent une position incontestée dans ce domaine aux yeux des électrices et électeurs. Cette constatation pourrait au moins être en partie responsable du fait que le PES profite de plus en plus des migrations d’électrices et électeurs au sein du camp de gauche au cours des dernières années (et bien sûr de manière particulièrement marquée en 2019, année d’élections climatiques) et que le PS se voit plutôt confronté à des départs vers le PES qu’à des gains en provenance du PES.

En résumé, la figure 5 montre que le PS ne peut guère espérer, du moins dans un avenir proche, gagner des voix supplémentaires sur la base de la thématique environnementale, mais qu’il ne peut pas non plus, comme certains autres partis sociaux-démocrates en Europe, marquer des points exclusivement sur des thèmes de politique sociale et économique. Dans de nombreux pays d’Europe occidentale, les thèmes sociopolitiques tels que la migration, le multiculturalisme ou l’intégration européenne sont davantage associés aux partis verts ou à d’autres partis sociaux-libéraux, tandis que les partis sociaux-démocrates ont plus de mal à communiquer des positions cohérentes et claires sur ces thèmes et à gagner à leur cause les personnes pour qui ces thèmes sont particulièrement importants.

Pour le PS en Suisse, ce n’est certainement pas un désavantage d’avoir une large palette thématique s’il s’agit de conserver sa suprématie dans le camp de la gauche (qui est tout sauf assurée pour les partis sociaux-démocrates à l’avenir). Par rapport au PES, le PS est nettement moins perçu par l’opinion publique comme un parti à thème unique. En même temps, cette situation de départ en principe favorable pour le PS signifie aussi qu’il doit défendre sa réputation de parti compétent dans de nombreux domaines et qu’il pourrait se mettre en difficulté en changeant de direction ou en provoquant des conflits internes au parti sur des thèmes comme la politique européenne ou migratoire.

En particulier, un rapprochement avec l’UDC sur ces thèmes pourrait avoir un effet dissuasif sur l’électorat actuel du PS, sans pour autant être en mesure d’enthousiasmer pour le PS un grand nombre d’électrices et d’électeurs actuel·le·s de l’UDC (voir à ce sujet le Policy Brief sur le “potentiel électoral de la social-démocratie suisse”). Rien n’indique donc que les migrations d’électrices et d’électeurs entre le PS et l’UDC vont s’intensifier à l’avenir. Comme au cours des trente dernières années, les résultats électoraux du PS devraient continuer à dépendre principalement de la mesure dans laquelle le PS parviendra, d’une part, à mobiliser les nouvelles électrices et nouveaux électeurs et les non-électrices et non-électeurs et, d’autre part, à faire pencher en sa faveur les migrations d’électrices et d’électeurs entre le PS, le PES et (dans une moindre mesure) les PVL.

Remarque : le présent article se base sur le Policy Brief “Wählerwanderungen rund um die Schweizer Sozialdemokratie“, édité par la Fondation Anny-Klawa-Morf à Berne. Il s’agit d’une compilation des principales conclusions de l’ouvrage qui vient de paraître chez NZZ Libro.


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Source de l’image: Unsplash